Et le vainqueur est… la Suisse

Point de vue

Et le vainqueur est… la Suisse

  • Ce mois verra – enfin – 24 nations se disputer le trophée de l’Euro 2020
  • Notre système de notation macro place l’équipe Suisse en position de favorite
  • Défense, milieu, attaque: pour gagner un portefeuille doit être solide partout

La pandémie a imposé un report d’un an, mais les fans de foot peuvent enfin se réjouir: le coup d’envoi de l’UEFA Euro 2020 est pour bientôt ! Comme il est de tradition chez Decalia, nous nous essayons à en prédire l’issue, utilisant des critères top-down – dans tous les domaines de jeu – pour classer les pays. Et, à l’instar d’un sélectionneur national, nous réfléchissons à comment construire un « portefeuille de rêve » dans les conditions actuelles de marché.

Un mot tout d’abord sur le format inhabituel de cette – 60ème – édition. Plutôt que d’être organisée par un ou deux pays, elle couvrira l’ensemble du continent, les matchs se déroulant dans 11 villes d’autant de pays. Une diversification régionale optimale ! Et les fans sont encouragés à « Live It. For Real. »: un changement bienvenu par rapport au tout-écran des 15 derniers mois.

Alors, qui des 24 prétendants soulèvera le trophée le 11 juillet ? Notre modèle propriétaire conjugue différents critères dans quatre catégories équi- pondérées: gardien (Covid/situation sanitaire), défense (risque pays), milieu de terrain (analyse macro et indice de performance environnementale) et attaque (indices de compétitivité et d’innovation, mesure PISA de la qualité du système éducatif). Le score global du pays, couvrant l’ensemble du terrain, est ensuite utilisé pour prophétiser le résultat de chaque match – et le futur champion.

Dès la phase de groupe, et plus encore en quarts de finale, les pays d’Europe du Nord (Royaume-Uni compris) devraient dominer les habituels favoris latins. La France et l’Italie ont actuellement des gardiens affaiblis, après une bataille particulièrement rude contre le Covid, tandis que l’Espagne est limitée dans l’entrejeu, ne pouvant s’appuyer sur des bases macro solides.

Notre pronostic pour les demi-finales ? La première devrait voir la Suisse déjouer les attentes et battre l’Allemagne 2-1, grâce à une défense, un milieu de terrain et une attaque uniformément excellents. Il se pourrait bien que l’Allemagne ne gagne pas toujours à la fin ! La seconde demi-finale devrait opposer les Pays-Bas à l’Ecosse, l’outsider s’inclinant ici de peu (3-2).

Ce qui nous amène à la finale: Suisse contre Pays- Bas dans le célèbre stade londonien de Wembley (rempli à 25% seulement ?) Si les joueurs de champ néerlandais ont peu à envier à leurs homologues suisses, le gardien semble plus fragile: la campagne de vaccination est moins avancée et les taux d’infection sont plus élevés. Aussi tablons-nous sur une victoire 2-1 de la Nati – une première historique !

Que la Suisse puisse finir championne d’Europe montre que le foot, comme l’investissement, ne se résume pas à posséder les joueurs les plus connus. Il arrive souvent de surpayer les talents. Tout comme il est commun d’accorder trop d’importance à un palmarès brillant – donc d’acquérir des noms ayant déjà épuisé leur potentiel. Enfin et surtout, l’accent doit toujours être mis sur l’équipe: toute recrue est à juger non sur ses propres mérites seulement, mais aussi sur comment elle peut renforcer/diversifier le portefeuille existant.

Si nous pouvions former une dream team paneuropéenne, comment ferions-nous ? Pour marquer des buts, nous chercherions bien sûr à dénicher des entreprises innovantes. Pour un milieu de terrain solide, avec des compétences à la fois défensives et offensives, nous sélectionnerions des noms de qualité bien placés pour bénéficier de la réouverture progressive et du retour de la consommation – plus l’excitation liée à l’Euro 2020 – ainsi que des leaders sur des marchés de niche. En matière de défense, santé et consommation de base semblent un choix idéal et évident. Il faut cependant garder à l’esprit que la frontière entre victoire et défaite peut être ténue et que, dans le foot comme en finance, aucune équipe n’est à l’abri de conditions défavorables ou de blessures inattendues.

Ecrit par Michele Pedroni, Lead Portfolio Manager, DECALIA European Conviction

Graphique du mois

Stratégie globale

Craintes de hausse des taux, donc moins de complaisance

  • La croissance US étant au pic, il est temps pour l’Europe de prendre le relais
  • Le mot « I » est de retour: un phénomène qui sera seulement transitoire ?
  • L’effet gravitationnel des taux d’intérêt ramène la valo de certains actifs sur Terre

Des indices PMI plus robustes que prévu en mai ont confirmé que la reprise économique européenne est bien engagée et, avec les progrès rapides sur le front du virus, nous attendons désormais d’autres surprises positives durant l’été. Ceci alors que la croissance américaine plafonne, après un impressionnant premier semestre, et que celle de la Chine se stabilise à ses niveaux pré-pandémiques. De fait, le moteur de la reprise se déplace des États- Unis vers l’Europe.

Malgré les récentes inquiétudes quant à un retour malvenu de l’inflation, notamment aux États-Unis, nous restons relativement sereins à moyen-long terme, dans la mesure où la montée des prix reflète en grande partie des facteurs temporaires. Aussi, bien que nous ne puissions exclure de nouvelles pressions à la hausse sur l’IPC de base ces prochains mois, en raison de problèmes logistiques dus à la nature extraordinaire de ce cycle conjoncturel, nous les voyons s’estomper d’ici à cet hiver avec la normalisation du contexte global sanitaire et économique. L’an prochain, l’inflation de base devrait se situer autour des 2%.

Sur le plan des marchés, nous reconnaissons qu’une trajectoire moins facile – plus volatile – nous attend. Après la forte progression des actions depuis le début de l’année et vu les valorisations historiquement tendues de moult classes d’actifs, le soutien macroéconomique pourrait en effet être remis en question, surtout si les investisseurs ne considèrent pas la récente poussée de l’inflation comme transitoire (ce qui impliquerait une hausse des taux) ou si les données américaines continuent de décevoir (à l’image du rapport sur l’emploi du mois dernier). Mais ces récentes préoccupations ont au moins eu le mérite d’atténuer la complaisance des investisseurs, ramenant sur terre les valorisations excessives de certains segments assez bien identifiés des marchés.

En conséquence, nous maintenons un biais pro- risque dans notre allocation d’actifs. En particulier, nous continuons à privilégier les actions (légère surpondération) et les actifs réels par rapport aux obligations (sous-pondération). Au cours des derniers mois, nous avons remanié notre part actions, y ajoutant une sélection d’actifs satellites afin de recalibrer les biais sectoriels/de style et arriver à un positionnement plus cyclique, qui permette aux portefeuilles de mieux résister à de nouvelles rotations du marché typiques d’un environnement de reflation. Sur une base relative, la remontée des taux et des anticipations d’inflation tend à soutenir les segments «value» et cycliques. Pour autant, notre préférence structurelle à long terme continue d’aller vers les marchés de croissance/qualité, plus résilients, tels que les États- Unis, la Chine et la Suisse.

Sur le plan obligataire, nous maintenons une duration cible limitée, ainsi qu’une surpondération relative du crédit. Nous recommandons toujours une stratégie barbell, conjuguant des positions courtes avec certaines positions longues. Ceci en particulier sur la courbe américaine, plus pentue, qui offre une valeur relative par rapport à la plupart des autres marchés développés – même après couverture des risques de change. Dans le crédit, nous continuons à privilégier les investissements activement gérés dans le «High Yield» (y compris la dette subordonnée et les hybrides) et la dette émergente en devises fortes, la sélectivité étant plus cruciale que jamais vu le resserrement général des spreads.

Ailleurs, nous continuons à sous-pondérer l’or, qui pourrait souffrir d’une hausse des taux réels américains (soit les anticipations d’inflation se calment, soit la Fed devra réduire la voilure). Et nous restons prudents à court terme sur le billet vert: son avantage relatif en termes de taux et de croissance devrait s’estomper, tandis que le fardeau du double déficit semble redevenir structurel.

Ecrit par Fabrizio Quirighetti, CIO, Responsable des stratégies multi-asset et obligataires